Ce n’est pas le début du voyage, c’est le voyage…

Lorsque j’ai terminé mes études artistiques, ma voie était toute tracée : j’étais prête à intégrer des studios de cinéma d’animation, pour m’insérer dans n’importe quel niveau de la chaîne de production (storyboard, recherches de personnages, animation, etc.). J’étais devenue une bonne « technicienne ».

Oui, mais voilà, lorsque j’ai voulu suivre une voie différente quelques années plus tard (m’installer pour vivre dans une région sans aucun studio d’animation à proximité), il m’a fallu repenser ma voie professionnelle. Je me suis donc déclarée en tant qu’illustratrice freelance.

Et bien sûr, au début, rien n’a fonctionné comme prévu… Je n’avais aucun réseau dans la région, aucun client pré-existant, et surtout… aucune méthode de prospection.

Car il faut plus que de la technique pour se lancer en freelance. Il faut savoir se vendre.

Et ça, aucune école d’art ne vous y prépare, ou en tout cas pas suffisamment. C’est d’ailleurs ce qui m’a profondément motivée dans la création de ce site.

On va vous dire de créer un site web, de créer un portfolio, de présenter vos « meilleurs travaux » et de démarcher… Des conseils judicieux, certes, mais on oublie de vous dire de :

-Créer un site web pour l’alimenter et fédérer une communauté : avec dans l’idéal une partie « Vitrine » pour présenter vos travaux, et une partie « Blog » pour parler de vos actualités (expositions, sorties d’albums, salons, Work in Progress, techniques…) et afficher votre EXPERTISE. Vous pourriez être surpris de voir que c’est cette partie qui génèrera le plus d’interactions et de retours. J’ai tenu plusieurs sites pro au cours de ma vie de graphiste : les premiers étaient de simples « portfolios » sur Wix, vers lesquels je redirigeais mes prospects… autant dire que je touchais assez peu de public. Puis, m’étant spécialisée dans la facilitation graphique, j’ai créé un site dédié à ce travail en particulier et j’ai commencé à écrire des articles sur les techniques et le matériel que j’utilisais. Mon site m’a amené la plupart de mes clients, rassurés à la fois par mon travail (« partie vitrine ») et par mon expertise (« partie articles’).. C’est-à-dire qu’à partir d’un certain taux de fréquentation de votre site, vous ne serez plus obligé de démarcher, et aurez même le luxe de pouvoir sélectionner vos commandes.

-adapter votre portfolio à votre cible : le client a besoin de voir que vous avez déjà travaillé sur des sujets se rapportant à sa demande, ça le rassure (personne ne veut être le premier patient d’un cardiologue qui n’a jamais opéré de coeur!)… Il sait que vous avez déjà une connaissance de la thématique, même diffuse. Si ce n’est pas le cas, créez un sujet personnel se rapprochant de la demande, ou proposez un « test » à votre client. Par exemple, une de mes commandes, en tant que free-lance, a consisté à travailler sur des montages photos pour un catalogue d’entreprise. Mon client n’avait cure de savoir si je maîtrisais l’anatomie ou le dessin de personnage, mais voulait du travail professionnel sur Photoshop. Je lui ai donc proposé de faire un premier test, sur une demi-journée. Il m’a envoyé les deux photos à mixer pour réaliser un panorama le matin, elles étaient dans sa boîte mail à midi, et l’après-midi il me signait un devis pour 60 photomontages ! Montrez vos capacités, n’ayez pas peur du « je n’ai jamais fait ça », et proposez des tests pour rassurer vos clients potentiels.

-de démarcher en présentiel : Hé bien oui, même à l’époque des mails, des visios-conférences et de Zoom, le démarchage physique reste indispensable dans certains cas. Pensez-y : nous sommes inondés de mails tous les jours, la plupart des studios n’ouvriront pas vos courriers ou ne prendront pas le temps d’y répondre, et les appels téléphoniques sont la plupart du temps filtrés par un standard. Démarcher physiquement permet de montrer votre motivation à travailler avec votre client, et de poser un visage sur un travail. Dans ces cas-là, soignez votre présentation, soyez avenant et montrez-vous adaptables et ouverts ! J’ai démarché une maison d’édition avec mon carton à dessin sous le bras, et en suis ressortie avec une demande d’illustration pour un conte, sans avoir jamais travaillé auparavant pour l’édition jeunesse !

-… Mais au-delà même encore du démarchage, ce sont les recommandations qui vous amèneront le plus de clients. C’est pour cela qu’il faut absolument soigner vos clients, leur offrir un service au-delà de leurs attentes ! Faites en sorte qu’ils se sentent complètement impliqués dans votre processus créatif, par exemple, à l’aide de nombreux échanges… ou si vous vendez des articles ( impressions, objets, etc.), pensez à la petite chose « en plus » : un bon de réduction pour le prochain achat, une carte manuscrite de remerciement, une fleur séchée glissée dans l’enveloppe, que sais-je… Une simple marque d’attention, pour remercier votre client d’avoir investi dans votre travail :). Gardez une chose à l’esprit : vous dépensez beaucoup plus d’énergie pour trouver un nouveau client que pour conserver ceux existants. Essayez de fédérer une communauté autour de votre travail (une couturière, par exemple, a créé une page FB où elle encourage toutes les clientes lui ayant acheté un produit -sac, robe, etc.) à se prendre en photo avec et à la poster sur sa page. Sa communauté est si active et soudée que ses créations sont achetées dès leur mise en ligne… ça fait rêver, non ?)

-Ne restez pas sur vos acquis, et formez-vous. D’abord, bien évidemment, sur l’aspect technique : vos enseignants vous ont ouvert des voies, mais tout ne peut être abordé pendant les études. Travailler sur des projets concrets, des demandes professionnelles, va vous obliger à « mettre les mains dans le cambouis » ! Comme lorsqu’on m’a demandé de créer une newsletter sur Photoshop alors que je n’avais encore jamais utilisé Dreamweaver. Internet regorge de tutoriels, de forums, de communautés et de livres où vous pourrez trouver des conseils précieux, et je pense sincèrement qu’il n’a jamais été aussi facile de se former en autodidacte qu’aujourd’hui. Soyez également à l’écoute des critiques constructives, les gens qui prennent le temps d’argumenter leur critique valent la peine d’être écoutés.

Et enfin, deux derniers conseils, qui pourront sembler contradictoires mais qui se complètent :

1-faites une chose à la fois, et faites-la à fond : vous voulez vous spécialiser dans l’illustration de couvertures de livres ? Allez-y, fréquentez les forums d’auteurs, postez des montages de couvertures, redessinez celles de vos romans favoris… vous finirez par toucher votre cible si vous pratiquez « l’alignement » : le bon post (votre travail) au bon endroit (le forum/site/ réseau social spécialisé) pour les bonnes personnes (les auteurs), et au bon moment (juste avant un salon du livre, un concours de nouvelles, etc.). Vous concentrer sur une seule tâche (le développement de mon portfolio orienté vers ma cible) vous donnera plus d’énergie et une meilleure connaissance du milieu que vous souhaitez toucher.

2-n’ayez pas peur de vous remettre en question. Faites fréquemment le point avec vous-même ( tous les six mois me semble être une bonne pratique). Si malgré tous vos efforts, vous voyez que vous vous épuisez à la tâche sans pouvoir vivre de votre proposition de service, n’hésitez pas à vous remettre en question. Peut-être que votre offre n’est pas assez claire pour vos clients ? Certes, vous « dessinez bien », mais qu’est-ce que vous pouvez faire pour eux ? Quel est le problème que vous résolvez pour vos clients ( leur fournissez-vous LE support de communication qui va toucher leurs propres clients, ou le portrait de l’être aimé, ou l’illustration d’une de leurs idées ou d’un prototype, etc.) ? Et vous faites-vous rémunérer à votre juste valeur ( voir cet article pour ce qui est de fixer ses tarifs) ?

Comme tout processus créatif connaît ses hauts et ses bas, il se peut aussi que votre créativité se tarisse sur votre sujet de prédilection. Ne prenez pas cela comme un problème, mais plutôt comme une « pause créative » pour recharger vos batteries (faites d’autres activités qui vous « nourrissent » créativement : musique, balades, cuisine, jardin…), et revenez sur les chiffres de votre activité freelance des derniers mois en les passant au crible de la méthode « 80/20 » : tâchez de repérer les activités qui ont généré entre 60% et 80% ou plus, de votre chiffre d’affaires, et concentrez-vous sur celles-ci. Il faudra sans doute faire des choix difficiles, mais à long terme, le plus difficile pour vous serait l’absence de choix : cela vous conduirait tout droit à l’épuisement.

Vivre de sa créativité n’est pas une longue route tranquille, mais un chemin sinueux plein de carrefours, où il vous faudra souvent choisir votre direction. Des fois, nous voulons forcer notre chemin sur une route qui n’est pas faite pour nous, et il est difficile de s’en rendre compte. Une prise de recul est alors nécessaire, combinée à une analyse chiffrée de vos données ( toute la méthode détaillée est expliquée dans mon ebook « Devenir graphiste Freelance et en vivre »). Mais si vous arrivez à saisir les signaux existants ( quelle activité m’a permis de faire le plus de CA en m’épanouissant ? Comment reproduire l’essai ?), vous vous créerez un chemin plus facile, qui vous emmènera plus loin et qui, pourquoi pas, pourra en inspirer d’autres autour de vous ?

En vous souhaitant une belle route créative, et abonnez-vous pour ne manquer aucun article 😉 !

Anne

Publié par AnneB

Illustratrice, scribe, mais aussi musicienne, formatrice et auteure... Free-lance, je suis ouverte à toute proposition de collaboration, rencontrons-nous !

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