(article précédent : épisode 0 )
En tant qu’artiste, votre premier pas va être de définir sur quel marché vous allez vous focaliser (oui, le FOCUS est la clé ! Si l’on teste sur de courtes périodes, il faut être à 200% sur ce que l’on teste pour réaliser des progrès – on reparlera de la concentration et de l’efficacité plus tard 😉 ! ).
Un marché regroupe plusieurs métiers, et fonctionne selon un subtil équilibre entre l’Offre ( la vôtre) et la Demande (celle du client). Pour vivre du dessin, il vous faut arriver à définir le marché dans lequel votre offre ( votre talent) correspondra le mieux à la demande (votre client).
1- Définir son marché:
Par exemple, vous pouvez décider de vous spécialiser dans :
– l’édition, en passant de l’illustration jeunesse à la BD…
-ou dans l’animation ou le jeu vidéo ( animation 2D, 3D, création de personnages…),
-ou dans le design d’objet, ou d’espace ( customisation, fresques, créations…)
-ou encore la mode, le spectacle ( dessiner en live ?), les Beaux-Arts (portraits, expositions ? ), donner des cours, etc.
Il s’agit de faire un choix parmi toutes ces professions artistiques. Par exemple, on m’a souvent demandé de réaliser des logos ou de la mise en page. Si j’ai pu accepter ces commandes en début de carrière, je n’en prends désormais plus, car je me sens plus “illustratrice” que “graphiste”. Je préfère dessiner des personnages que travailler avec des grilles, de la typo et retoucher des courbes de Bézier pendant des heures… N’oubliez pas : les commandes que vous acceptez orientent vos prochaines commandes ! Vos futurs clients seront rassurés de savoir que vous avez déjà une expérience similaire à leur demande… Aussi, déterminer dès le début ce qui vous attire vous permettra de gagner un temps précieux sur l’élaboration de votre portfolio !
2-Déterminer son talent :
Pour déterminer votre marché, vous devez essayer de déterminer votre talent principal… ce qui n’est pas aisé et peut prendre du temps !
Pour déterminer votre talent, prenez une feuille blanche, et divisez-la en 2 colonnes. Dans la colonne de gauche, vous allez lister ce que vous aimez faire, les choses pour lesquelles vous êtes doués (dans mon cas, il s’agissait par exemple de la bd, du storyboard, du dessin de personnage, de l’enseignement, du cinéma d’animation…). Dans la colonne de droite, listez maintenant ce qui vous passionne, ce à quoi vous consacrez le plus de temps ( me concernant, toujours, il s’agissait de la BD, du dessin numérique, et de la lecture de livres techniques). Partons du principe que ce à quoi vous consacrez le plus de temps est ce dans quoi vous serez meilleur… et orientez vos recherches dans ce sens ! C’est, entre autre, ce cheminement de pensée qui m’a emmenée de l’illustration au scribing, et permis de doubler mon chiffre d’affaires sur une année en travaillant moins ( voir mon ebook sur la méthode “80/20”) .
3-Penser “likes” ou “impact” ?
Lorsque l’on essaye de mesurer l’impact que nos productions artistiques ont sur les gens, on a tendance à privilégier la quantité de retours ( les “likes”), à la qualité des commentaires. Or, les deux sont des paramètres à prendre en compte : les likes correspondent à la portion de population que votre travail a touché, tandis que les commentaires vous informent sur la “profondeur” ou l'”émotion” qui a été suscitée. Par exemple, lorsque j’ai débuté la diffusion de mon webcomics, j’avais 500 visites par jour dès que je postais une nouvelle planche ( correspondant aux “likes”). Mais seuls les commentaires me permettaient de conserver la motivation de grappiller sur mes heures de sommeil pour continuer de créer : certains lecteurs me disaient attendre la suite avec impatience, d’autres s’être remis à dessiner après m’avoir lue, d’autres encore s’attachaient à mes personnages…. Et lorsque j’ai lancé ma campagne Ulule pour précommander le Tome 2, la plupart des auteurs de commentaires m’ont soutenue… car un commentaire engage plus qu’un simple like : vous avez eu un impact sur la personne, et elle tient à vous le faire savoir !
Listez donc vos talents auxquels les gens ont le plus répondu (pour moi, la BD au format numérique), et ceux qui ont eu le plus d’impact auprès des gens (lorsque j’illustre en direct un storyboard, sur mon ipad, pour un client, et que je vois ses yeux s’éclairer en disant : “c’est exactement ça” !)
4- Affiner votre recherche :
Si vous hésitez entre plusieurs marchés possible ( et c’est bien normal, après tout la créativité n’est pas cloisonnée : vous pouvez tout à fait être à l’aise en BD, dessin de mode et mise en page, par exemple !), voici une analyse un peu plus poussée qui vous permettra de partir sur un score.
Listez 3 métiers potentiels, en lien avec les talents que vous avez détectés, et passez-les au cible de cette analyse, de la façon la plus objective possible :
Métier : …………………………
Passion ( est-ce que ça vous motive le matin?) : …./25
Talent ( êtes-vous doué dans ce domaine ?) : …./25
Connaissance du métier ( savez-vous à quoi vous attendre ? ) : …./25
Demande ( quelles sont les opportunités ? ) : … /25
Total : …../100
Parmi ces 3 métiers listés et notés, observez celui qui obtient le plus gros score sur 100, et essayez de trouver 4 personnes que vous admirez dans ce métier ( par exemple, pour moi dans la BD, je peux citer Mignola, Sienkiewicz, Bisley et Toppi).
Essayez ensuite de comparer leurs marchés : leurs clients communs, leurs forces communes, leurs supports de communication, leurs similarités… ( parmi les exemples que j’ai cité, on retrouve un univers intérieur et graphique fort, des publications assez peu “mainstream” mais une grande technicité artistique, qui soude une communauté de fans autour de leurs oeuvres, et des univers enfin plutôt sombres, adultes, plus proches des romans graphiques). Les artistes dont j’apprécie le style sont plutôt discrets, et se sont fait reconnaître à la force de leur talent, usant de la BD comme d’un médium graphique ( Bisley et Sienkiewicz sont également peintres) ou pour porter des histoires fortes ( l’ambiance d’un Mignola ou de Sharazde de Toppi vous transporte définitivement hors de votre quotidien 🙂 !)
Bien sûr, on peut aussi noter que ce ne sont pas des auteurs de BD français… le marché de la BD dans l’Hexagone étant saturé et peu rémunérateur, j’ai rapidement fais une croix sur ce métier. Mes scores en terme de “passion” et de “demande” étaient trop bas pour celui-ci : je ne me sens plus prête à passer 10 heures par jour devant mon ordi pour dessiner des planches. Mais si pour vous, la passion est encore neuve, et que votre seul frein est le marché saturé, vous pouvez quand même vous lancer et focaliser votre énergie à essayer de percer ( en créant votre blog BD, en postant sur les réseaux, etc) :), c’est à chacun d’évaluer où il se situe par rapport à cela ( et ce système d’évaluation par score, couplé à des périodes d’essai de 6 mois, est un bon moyen pour cheminer sur sa voie créative) !
La prochaine fois, nous parlerons de “trouver une niche” et de “définir votre objectif”.
À bientôt !
Anne