Bonjour à toutes et tous, et bienvenue dans ce nouvel épisode de l’interview créative !
Aujourd’hui, je vous propose de partir à la rencontre de l’univers coloré et ludique de Jolijojo, jeune illustrateur qui travaille au sein du studio de BD “l’Atelier du plan B” à Angoulême !

VdD : Bonjour Jo (c’est plus court !), peux-tu te présenter en quelques lignes ?
JJ : Bonjour Anne, bonjour lecteurs et lectrices. Que dire… Je suis Jolijojo, ou bien Jo, pour aller plus vite ! J’ai 37 ans, je vis sur Angoulême, et je suis illustrateur jeunesse et animateur.
VdD : Est-ce que tu as toujours su que tu voulais vivre du dessin ? Quel a été l’élément, ou la rencontre, qui a pu déclencher ta vocation ( s’il y en a eu un) ?
JJ : Je dessine depuis que je suis entré au collège mais il m’a fallu un long moment pour envisager sérieusement de vivre du dessin. A l’époque j’envisageais plutôt de devenir archéologue (merci Indiana Jones ! )
Après, comme beaucoup d‘enfants des années 80, j’ai baigné dans les dessins animés et les BD, et le dessin à toujours occupé une grande place dans ma vie. Au lycée, je m’ennuyais royalement, et c’est là que j’ai commencé à dessiner sur toutes mes feuilles de cours. C’est aussi à ce moment là que je me suis dis que devenir dessinateur serait une bonne idée…
VdD : Une bonne idée, mais pas forcément un choix de métier évident, et qui effraye souvent notre entourage…
JJ : Disons qu’il n’y a pas longtemps que ma famille a accepté le fait qu’être illustrateur soit un « vrai »métier ! Je pense qu’ils auraient été rassuré que je bosses en cdi n’importe où, et que je me contente de dessiner sur mon temps libre.

VdD : Peux-tu nous raconter ton parcours scolaire ?
JJ : Arf, c’est pas bien glorieux 🙂 ! J’ai passé un bac L, puis une première année en fac d’art plastique ou j’ai appris pendant tout un semestre à colorier de beaux carrés de 4×4 cm en nuances de gris… Comme les écoles de dessins étaient beaucoup trop chères, j’ai tout laissé tombé, et je suis aller bosser !
VdD : Et donc, tu entames ton parcours professionnel ?
JJ : Là aussi, c’est assez chaotique… pendant plusieurs années après la fac, j’ai officié en tant que pierceur dans une boutique de tatouage. Et puis un jour, par l’intermédiaire de mon épouse qui est animatrice, j’ai passé un test pour faire du “clean vectoriel” (créer des marionnettes vectorielles, prêtes à être animées, sous Flash) chez Ankama Animation, sur la série Wakfu.

Du coup je suis passé de pierceur à cleaneur, et j’ai commencé à vivre de mon dessin par le plus grand des hasards ! Depuis j’ai travaillé essentiellement dans l’animation, en tant que cleaneur ou coloriste. Et maintenant, me voilà en train d’essayer de devenir illustrateur professionnel !
VdD : Te qualifierais-tu d’autodidacte ? Penses-tu qu’un diplôme d’une école d’art soit utile pour réussir, ou faut-il plutôt miser sur sa passion et un bon portfolio ?
JJ : Clairement oui, je suis autodidacte. A la vue de mon parcours, on doit pouvoir dire ça !
Pour le diplôme d’art, je ne suis pas convaincu que cela soit nécessaire. Bien sûr, faire une école peut aider à aller plus vite, mais maintenant qu’on peut tout apprendre sur YouTube, je suis vraiment pas sûr que payer des dizaines de milliers d’euros une école d’art soit si utile que ça ! Je reste persuadé que pour réussir dans ce milieu, un peu comme dans tout les autres d’ailleurs, ce qui compte le plus c’est d’avoir un réseau bien fourni.
VdD : Et de fournir beaucoup de travail, aussi ! Ton univers particulier est très fouillé, et facilement identifiable. Combien de temps as-tu pris pour trouver ton style ? Conseillerais-tu à des jeunes illustrateur.trices de se spécialiser dans un style ou au contraire de « toucher à tout » pour ne se fermer aucune porte ?
JJ : Merci ! Ça fait peut être une quinzaine d’année que dessine avec ce style plutôt minimaliste. Objectivement je ne suis pas bon en dessin académique , et ça ne m’intéresse pas. Du coup j’ai préféré me concentrer sur mes points forts pour développer mon style. Le trait est mauvais, enlevons le, la perspective, pareil… Comme je prend du plaisir à travailler les formes et les couleurs, je me suis concentré uniquement la dessus.
J’ai l’impression (même si je me trompe peut-être complètement) que, comme le marché de l’image est plus concurrentiel que jamais, ce qui compte c’est de sortir un peu du lot ! Donc pour ça, il vaut mieux avoir conscience de ses points forts, les travailler à fond, et surtout prendre du plaisir, pour ne pas s’épuiser et perdre le goût du dessin !

VdD : Comment travailles-tu ? En traditionnel, en numérique ? Pourquoi avoir fait ce choix ?
JJ : En travaillant dans l’animation j’ai découvert le logiciel Flash (remplacé aujourd’hui par Adobe Animate) et le dessin vectoriel. Depuis je ne fait plus que ça.
C’est une méthode plutôt éloignée du dessin traditionnel, je la rapprocherais presque davantage de la sculpture : Chacun de mes personnages est composé de dizaines de calques, que je peux réajuster selon mes besoins. Du coup c’est une technique qui me correspond bien, et qui me permet de compenser mes lacunes techniques en dessin traditionnel.
VdD : Du coup, tu ne travailles plus qu’en numérique, sur des logiciels vectoriels ? Quel matériel et quels logiciels utilises-tu ?
JJ : J’ai d’abord, comme beaucoup de monde qui travaillent en numérique, commencé à travailler sur pc, avec une tablette graphique et les logiciels d’Adobe.
Ensuite j’ai découvert de dessin sur IPad Pro et le logiciel Affinity Designer de chez Serif , et depuis je ne me sert plus que de ça. J’adore l’ergonomie de l’iPad et son format (12,9 pouce), et Affinity est un logiciel vectoriel hyper intuitif et performant. Et c’est tellement moins cher que de payer la suite Adobe tout les mois ! Je crois que l’app doit coûter dans les 20 euros, à vie !
VdD : Je confirme ! J’ai moi aussi migré tout mon workflow d’Adobe vers Affinity (voir cet article) ! Parlons aussi un peu de ton lieu de travail : tu travailles en atelier avec d’autres créatifs, peux-tu nous expliquer ce qui a motivé ton choix ?
JJ : Je travaille à “l’atelier du plan B” sur Angoulême. J’ai longtemps essayé de travailler chez moi, mais c’était compliqué : j’étais isolé, et trop de chose venaient parasiter mon travail. En atelier, j’ai retrouvé une sorte d’émulation artistique, et le fait d’être avec d’autres professionnels du dessin aide beaucoup.
Je n’ai pas vraiment de routine de travail particulière, hormis le fait de faire des journées de boulot assez classique ( 9h / 18h ). J’ai des “to-do-lists” pour la semaine, et je fais en sorte qu’elles soient remplies avant le week-end.

VdD : Dirais-tu aujourd’hui que tu peux vivre de ta passion ? Si non, as-tu pu identifier tes obstacles ( marché de l’illustration trop concurrentiel, du mal à se faire connaitre, difficulté à trouver des clients, des missions rémunérées, etc.) ?
JJ : Disons que pour le moment c’est compliqué. Je peux vivre de mon dessin en faisant de l’animation sans trop de problème, par contre j’ai encore beaucoup de mal à percer dans le milieu de l’illustration jeunesse.
Je commence à développer mon réseau professionnel depuis que je suis en atelier, mais le marché de l’illustration est assez surchargé, et les éditeurs préfèrent suivre des études de marché et continuer de vendre ce qui se vend déjà plutôt que de miser sur de nouveaux auteurs…
Mais ça va venir et je vais continuer à travailler pour que ça marche !
VdD : Si tu pouvais changer quelque chose dans ce métier, d’un coup de baguette magique, qu’est-ce que ce serait ?
JJ : À part mon compte en banque !?! 🙂 … Je souhaiterais que les maisons d’éditions soient moins frileuses vis à vis des nouveaux auteurs.
VdD : Malgré cette frilosité des éditeurs et un marché concurentiel, encouragerais-tu quand même de jeunes illustrateurs/trices à tenter leur chance dans cette voie ? Pourquoi ?
JJ : C’est une voie difficile mais ça vaut le coup. Donner vie à ses idées à travers le dessin, travailler pour embellir le monde et donner du plaisir aux gens, c’est quand même un chouette boulot !

VdD : C’est sûr ! Peux-tu nous parler de tes projets actuels ?
JJ : Actuellement je termine un livre jeux intitulé “L’ Anniversaire d’Abi”. C’est un “cherche et trouve” avec de grandes illustrations foisonnantes et pleines de couleurs (cf illustration ci-dessus). Je vais très prochainement lancer une campagne de financement participatif sur Ulule pour le financer.
VdD : Super, il faudra nous faire passer l’info ! … Quand on voit tes visuels, on les imaginerait bien sur des objets, en impression textile (T-shirts, etc) ou autre. Est-ce que c’est une piste que tu as déjà explorée ? Peux-tu nous en parler ?
JJ : Je n’ai pas encore eu le temps d’explorer cette piste, mais c’est dans mes “to-do-lists” ! Ça, et pleins d’autres goodies !
VdD : Et après cette campagne Ulule ? Comment te projettes-tu, dans 3, 5 ans ?
JJ : D’ici là j’aurais sorti plusieurs livres et je vivrai pleinement de mes dessins. J’ai pas mal de projets sur le feu et j’espère les avoir concrétisé, d’ici là !
VdD : Je te le souhaite de tout coeur ! Le mot de la fin, à toi l’honneur !
JJ : Courage, ça va marcher ! 😉
Retrouvez le travail de Jo en cliquant sur ce lien :https://linktr.ee/JolijojoUniverse
Et suivez-le sur son Instagram : https://www.instagram.com/jolijojo_universe/
Un grand merci pour cet interview, Jo, et bonne route à toi !;)
