Bonjour à toutes et tous, et je vous souhaite une merveilleuse année 2023, pleine de santé, de joie et de créativité 🙂 !!
Me voilà de retour après de trèèèès longs mois d’arrêt maladie, mais je vais mieux, et je vais tâcher de reprendre le rythme sur mes articles, newsletters, et tout et tout. Yay 🙂 !
En parlant d’articles… je ne pensais pas commencer l’année sur un thème aussi sérieux, mais cela fait quelques mois que je m’intéresse au sujet de l’IA. La sortie récente d’une vidéo de Scendre, (illustratrice française dont je parle, un peu plus loin, dans cet article) m’aura donné l’impulsion nécessaire pour poser des mots sur mon ressenti. Je vous souhaite donc une bonne lecture (et n’hésitez pas à cliquer sur les nombreux liens qui parcourent ce texte, le sujet est dense alors je vous renvoie sur de nombreux articles externes).
Illustration de l’article : illustration générée par MidJourney, qui semble n’avoir pas encore très bien compris combien de doigts comporte une main humaine… Ouf !
Qu’est-ce que l’IA, exactement ?
Si l’on s’en réfère à la définition du Parlement européen, l’intelligence artificielle représente tout outil utilisé par une machine afin de « reproduire des comportements liés aux humains, tels que le raisonnement, la planification et la créativité ».
Si l’arrivée de l’IA représente une avancée incroyable dans de nombreux domaines ( tels que la médecine, l’apprentissage, le partage de données, les transports, etc.), elle charrie aussi son lot d’inquiétudes et d’interrogations. Comme lors de toute avancée technologique marquante ( la photographie au temps des peintres, le métier à tisser ou le tracteur, les robots dans les usines, etc.), nombreux sont les corps de métiers s’inquiétant de la pérennité de leur travail face à ce nouvel outil (d’ailleurs, un site fut même mis en ligne, en 2013, pour savoir si les robots menaçaient votre métier : https://willrobotstakemyjob.com/).
SI la plupart des IA sont développées pour des applications liées au travail et à l’industrie, certaines d’entre elles commencent à être davantage connues du grand public, à mesure qu’elles investissent la sphère créative ( dessin, musique et écriture, en l’occurrence). Certaines, produisant des résultats parfois spectaculaires et bluffants, n’ont désormais plus rien à envier aux productions purement humaines ( on se souvient encore de cette illustration générée par MIdJourney, qui remporta un concours d’art aux USA en 2022).
Pour créer quoi ?
1-Des textes et des idées
Sur le plan des comportements humains, par exemple, on voit arriver chatGPT, une IA censée optimiser les modèles de dialogue ( elle répond aux questions, reconnait ses erreurs, rejette les demandes inappropriées, etc.), avec laquelle vous pouvez discuter de manière bluffante. Mais l’on peut également parler de Sudowrite, qui se propose d’écrire des textes à votre place, à partir de quelques mots… ou de tout le panel d’applications dédiées à l’écriture, à la recherche des meilleures phrases optimisées SEO, ou de vos 300 prochains posts « originaux » pour alimenter vos réseaux sociaux ( cliquez ici pour une liste d’outils d’écriture générés par IA).
Il existe même un projet artistique, mené par Mikkel Thybo Loose et Andreas Refsgaard, autour de la création d’une librairie en ligne entièrement virtuelle ( https://booksby.ai/), au sein de laquelle tout a été généré par des IA ( profils des auteurs, textes, couvertures des romans et même avis des lecteurs). Si tout cela relève de la création numérique pure, vous pouvez toutefois acheter vos copies imprimées des livres sur Amazon.
2-Des oeuvres graphiques complètes
Dans le domaine de la BD, mixant textes et images, les rendus sont encore plus impressionnants. Voici quelques exemples de nouvelles graphiques générées par des IA ( les programmes les plus connus étant Dall-E, MidJourney et Crayion, entre autres) :
Si, comme moi, à la vue de ces couvertures, vous pensez que le rendu est sympa mais que cela manque de détails, dites-vous que l’IA évolue à une vitesse prodigieuse ( le principe de l’IA étant que plus on l’alimente, plus elle apprend).
Récemment, je suis tombée sur un article dédié au travail de Steve Coulson (https://www.ladn.eu/mondes-creatifs/comment-ecrire-une-bd-avec-une-ia-la-lecon-de-steve-coulson/), qui a remis en perspective tous mes aprioris… Car oui, il est possible de faire de la BD avec MidJourney, en écrivant les bon « prompts » ( lignes de commandes), et d’obtenir un rendu cohérent, réaliste et… bluffant.
Ci-dessus : pages de Summer Island, BD de Steve Coulson créée avec MidJourney. Vous pouvez retrouver des explications de son processus créatif et davantage de ses comics, en téléchargement libre, sur le site campfire.
Enfin, vous aurez peut-être entendu parler de l’utilisation de MidJourney par une grande maison d’édition ( Michel Lafon), pour la couverture d’un de leur roman sorti cet automne, Poster Girl. Le choix, pour une maison d’édition reconnue, d’avoir eu recours à une IA plutôt qu’à un humain pour réaliser leur couverture, pose des questions de fond sur l’utilisation commerciale de ces images.
L’IA s’alimentant des milliers d’images à sa disposition sur le web, qu’en est-il de la protection des artistes et de leurs droits d’auteurs ? Comment, en tant qu’artiste, pourra-t-on encore faire valoir et reconnaître son travail, fruit de milliers d’heures de pratique, lorsqu’un programme peut créer une image au rendu spectaculaire, plus vite et pour moins cher ? Faut-il s’inquiéter de cet outil, ou le voir au contraire comme un « multiplicateur de possibilités » ?
Au-delà des questions purement techniques amenées par l’IA dans les métiers créatifs, se posent des questions éthiques, économiques et sociales. De nombreux artistes ont déjà commencé à enlever d’internet leurs créations, sur des plate-formes telles que Artstation par exemple, et réclament une meilleure, et rapide, législation des droits d’auteurs face à une utilisation sans leur consentement. Cela risque, cependant, de s’avérer long et complexe.
Une illustratrice française, Scendre, a très bien résumé cet état d’esprit, mélange d’angoisse et de fascination, des créatifs face à l’IA. Je vous laisse voir sa vidéo ci-dessous, très instructive :
Faut-il s’en inquiéter ?
Difficile de répondre à cela… Certes, l’outil est déjà là, à disposition du grand public, et crée des rendus stupéfiants. Mais cette technologie reste un outil, qui nécessite d’être encadré au niveau légal, ainsi que toutes les utilisations qui en seront faites. Inutile de vouloir pratiquer la politique de l’autruche, il vaut mieux dès à présent ouvrir le dialogue, et se poser les questions des usages et des limites de l’IA (comme l’aborde Karim Rahou, professeur aux Gobelins, dans son article rédigé suite aux questions de ses élèves, ou encore ce récent et très documenté article de Franceinfo.fr )
Va-t-on voir apparaître des systèmes de « rémunération », comme l’évoque Scendre dans sa vidéo, pour payer des royalties aux créateurs dont l’IA s’inspirera pour ses illustrations ? Va-t-on délaisser peu à peu les illustrations numériques, pour aller vers une revalorisation du dessin « humain » en tant qu’étape même du processus créatif ( avant une maquette, lors de réflexions collectives, de schémas, de storyboards, etc.) ? Je n’en sais rien, mais je crois qu’il est important que l’on porte le débat collectivement et de manière ouverte, en faisant confiance à notre créativité et notre adaptabilité humaine face aux avancées technologiques :).
Et vous, qu’en pensez-vous ? Je serais curieuse de lire vos commentaires à ce sujet, n’hésitez pas à partager votre vision et à ouvrir le débat !
À bientôt !
Anne
Edit : Dave McKean, auteur de comics au style incroyable, que je vénère, s’est également exprimé au sujet de l’IA, il y a quatre mois de cela. Voici son interview, en anglais, et en vidéo, qui soulève de nombreuses questions très intéressantes :